PLAFONNEMENT DU NOMBRE DE PERMIS D’ÉTUDES DÉLIVRÉS AUX ÉTUDIANT.E.S ÉTRANGERS ET ÉTRANGÈRES – CE QU’IL FAUT SAVOIR

Student checking their phone

Par Moira MacDonald

 

Le programme canadien de permis d’études pour les ressortissant.e.s étrangers et étrangères a beaucoup changé depuis la fin de 2023. Parmi ces changements, le gouvernement du Canada a annoncé le 22 janvier dernier la mise en place immédiate d’un plafond de réception des demandes de permis d’études sur une période de deux ans. Au moment de l’annonce, il était attendu que la mesure aurait comme résultat l’approbation d’environ 360 000 permis d’études en 2024, soit une baisse de 35 % relativement à 2023.

 

Vous envisagiez de venir faire vos études universitaires au Canada? Vous avez probablement beaucoup de questions. « Pour les étudiant.e.s, la première question est ‘‘le Canada est-il toujours ouvert?’’ La réponse courte est ‘‘oui’’ », confirme Larissa Bezo, présidente et chef de la direction du Bureau canadien de l’éducation internationale (BCEI).

 

Cependant, au vu de la croissance massive du nombre de permis accordés au cours de la dernière décennie et de préoccupations concernant le respect des obligations du pays envers les étudiant.e.s, le ministère fédéral de l’Immigration a décidé d’intervenir pour protéger l’intégrité du système et veiller à ce que tous soient traités de manière équitable. Aucune cible n’a été annoncée pour le traitement des demandes de permis d’études en 2025; le tout sera réévalué à la fin de 2024, a déclaré le gouvernement. C’est la première fois que le Canada impose une telle limite.

 

« Pour être tout à fait clair, ces mesures ne sont pas dirigées contre les étudiant.e.s étrangers et étrangères. Elles visent à garantir que ceux et celles qui viennent au Canada reçoivent l’éducation de qualité à laquelle ils se sont inscrits », a tenu à assurer le ministre de l’Immigration, Marc Miller, dans son allocution du 22 janvier.

 

Qu’est-ce que cela signifie pour vous, possible futur.e étudiant.e de l’étranger? Les expert.e.s du secteur maintiennent que le Canada continue d’offrir une éducation de qualité reconnue mondialement. Vous devriez toutefois prendre le temps de vous renseigner sur les récents changements et leur incidence sur vous, notamment pour savoir si votre programme d’études prévu est visé par le plafond. Si c’est le cas, renseignez-vous sur les exigences supplémentaires, notamment la très importante « lettre d’attestation provinciale », et sur les délais de traitement de votre demande.

 

Maintenant, déboulonnons quelques mythes…

 

Le Canada élimine-t-il les visas pour étudiant.e.s étrangers et étrangères?

Non. Le ministère canadien de l’Immigration réduit le nombre de nouvelles demandes de permis d’études qu’il traitera en 2024 et 2025. Pour 2024, il s’est fixé un plafond de 606 250 demandes pour les programmes visés.

 

Est-ce que cette mesure touche l’ensemble des étudiant.e.s étrangers et étrangères?

Non. Les étudiant.e.s étrangers et étrangères qui poursuivent des études de maîtrise ou de doctorat, ou qui s’orientent vers des programmes d’enseignement primaire ou secondaire ne sont pas concerné.e.s par le plafond, tout comme ceux et celles qui demandent le renouvellement d’un permis d’études existant. Les étudiant.e.s qui viennent au Canada pour six mois ou moins ne sont pas tenu.e.s d’avoir un permis d’études.

 

Les universités canadiennes souhaitent-elles encore accueillir des étudiant.e.s étrangers et étrangères? Est-ce que ça vaut encore la peine de venir au Canada?

Une fois de plus, la réponse à ces questions est « oui ». Les universités canadiennes sont toujours intéressées à recevoir des étudiant.e.s étrangers et étrangères de tous les cycles. « Les universités canadiennes acceptent toujours des demandes d’admission de l’étranger, et c’est le bon moment de déposer la vôtre », explique Graham Barber, directeur adjoint, Relations internationales à Universités Canada, le porte-parole des universités canadiennes. Les cycles supérieurs sont exclus du plafond imposé sur les demandes de permis. Certains observateurs de l’immigration en déduisent que le Canada est particulièrement intéressé par les étudiant.e.s de ce niveau d’études. Vous faites partie de cette catégorie et vous avez votre lettre d’acceptation en main? Il n’y a aucune raison de repousser votre demande de permis.

 

Comment le nouveau plafond est-il appliqué et quelles sont maintenant mes chances d’obtenir un permis?

Moins de permis seront accordés cette année que l’an dernier. Leur nombre devrait se rapprocher de ce qu’il était en 2022 (407 000, tous niveaux d’études confondus), ce qui n’est pas rien. Les 606 250 demandes de permis d’études qui seront traitées pour les groupes plafonnés ont été réparties entre les dix provinces et les trois territoires du Canada, en fonction de leur population. Il leur revient de diviser leur part entre leurs universités, collèges et autres « établissements d’enseignement désignés ».

Pour certaines provinces plus en demande, comme l’Ontario, les coupures sont drastiques et peuvent atteindre 50 % ou plus. La Colombie-Britannique a fait état d’une allocation de 83 000 demandes de permis d’études, ce qui est inférieur aux 97 000 demandes enregistrées en 2023. Toutefois, d’autres provinces qui ont reçu moins d’attention de la part des étudiant.e.s étrangers et étrangères dans le passé pourraient voir leur marge de manœuvre augmenter.

 

Est-ce que la demande de permis d’études elle-même a changé? Qu’est-ce que cette « lettre d’attestation » dont j’entends parler?

Le changement le plus important est que chaque demande de permis assujettie au plafond doit désormais s’accompagner d’une lettre d’attestation provinciale (LAP). La LAP est la preuve que l’autorité provinciale ou territoriale compétente peut accepter la demande en vertu de son plafond. Une LAP doit accompagner toute demande de permis d’études pour les programmes concernés déposée après l’annonce du 22 janvier. Sont exclus de cette exigence les programmes d’études non visés par le plafond (maîtrise, doctorat, enseignement primaire et secondaire).

Lors d’une annonce précédente, le ministère de l’Immigration avait également révisé à la hausse les exigences financières relatives au coût de la vie imposées aux demandeurs de permis d’études. Un demandeur ou une demandeuse seul.e doit maintenant prouver qu’il ou elle dispose de 20 635 $ en plus d’un montant équivalant à sa première année de droits de scolarité, que sa demande soit assujettie au nouveau plafond ou non.

 

Où puis-je me procurer la lettre d’attestation?

La première chose à faire est de vous renseigner auprès de l’université où vous avez déposé votre candidature (ou avez été accepté.e). Les provinces et territoires ont jusqu’au 31 mars pour se doter d’un mécanisme pour la délivrance des lettres d’attestation.

Le Québec satisfait à l’exigence depuis le 13 février  grâce à la modification de son Certificat d’acceptation du Québec (CAQ). Notez que les CAQ émis avant le 13 février ne font pas office de LAP et que vous devez demander la nouvelle version du CAQ si vous soumettez une demande de permis après le 22 janvier. L’Alberta a indiqué que son système était en place depuis le 1er mars, et la Colombie-Britannique depuis le 4 mars. Ces provinces envoient directement les LAP à leurs établissements postsecondaires, qui les transmettent ensuite aux étudiant.e.s concerné.e.s. J’invite les étudiant.e.s intéressé.e.s par les provinces et territoires qui n’ont encore rien annoncé à communiquer directement avec l’établissement visé pour en savoir plus sur l’échéancier », ajoute Larissa Bezo du BCEI. Mais soyez patient.e.s d’ici le 31 mars – « Si un établissement vous dit ne pas encore avoir reçu d’information, c’est que c’est vrai ».

 

J’ai entendu dire que le Canada allait profiter de cette mesure pour limiter le nombre d’étudiant.e.s qui proviennent de certains pays. Est-ce vrai?

Le ministère de l’Immigration affirme que « [t]outes les demandes de permis d’études sont examinées de manière équitable et en fonction des mêmes critères, et ce, peu importe le pays d’origine. » Chaque établissement est responsable de son propre recrutement. Ces dernières années, nous avons remarqué que plusieurs élargissaient sciemment leurs horizons. Il n’y a toutefois aucune façon de savoir comment le plafond sera appliqué par les universités.

 

J’ai entendu dire que certains programmes seraient favorisés, par exemple la médecine. Est-ce vrai?

Voici ce que le ministère fédéral de l’Immigration a à dire à ce sujet : « Les écoles de médecine sont considérées comme des programmes de premier cycle ou donnant droit à un diplôme reconnu et ne sont donc pas exemptées du plafond. Ce sont les provinces et les territoires qui déterminent la répartition de leur allocation entre les établissements d’enseignement désignés. » Dans les faits, seules les provinces où la demande est trop forte pour le nombre de permis à accorder, comme l’Ontario, auront à décider de leurs priorités en la matière. Nous n’avons rien entendu à ce sujet jusqu’à présent.

 

J’ai déposé ma demande après le 22 janvier. On me l’a retournée parce que je n’avais pas joint de lettre d’attestation. Est-ce que ma demande a été rejetée?

Le ministère fédéral de l’Immigration qualifie ces demandes de « non traitées » plutôt que de rejetées. Vous pouvez soumettre votre demande de nouveau, en vous assurant cette fois-ci d’inclure la LAP, le cas échéant.

 

J’ai déposé ma demande de permis d’études avant le 22 janvier, mais elle n’avait pas encore été traitée lorsque le plafond est entré en vigueur. Qu’en est-il?

Selon le gouvernement fédéral, les étudiant.e.s qui ont déposé leur demande de permis d’études avant l’annonce du 22 janvier n’ont pas besoin de prendre d’autres mesures pour se conformer aux nouvelles exigences. Le traitement de leur demande s’est poursuivi au même titre que celui des demandes des étudiant.e.s étrangers et étrangères dont les programmes sont exemptés du plafond.

 

J’ai déposé ma demande de permis d’études avant le 22 janvier, mais elle m’a été retournée, car elle était incomplète. Dois-je joindre une lettre d’attestation lorsque je la soumettrai de nouveau?

 

Oui.

 

Mon permis d’études vient à échéance cet été. Vais-je devoir me procurer une lettre d’attestation pour le renouveler? Le plafond m’empêchera-t-il de renouveler ou de prolonger mon permis actuel?

Non. Les titulaires actuel.le.s d’un permis d’études au Canada ne sont pas concerné.e.s et n’ont pas besoin d’obtenir une LAP.

 

J’ai été accepté.e dans un programme universitaire débutant au printemps ou à l’été 2024, et je n’ai toujours pas de permis d’études. Qu’est-ce que je dois faire?

Si vous n’avez pas demandé votre permis d’études avant l’annonce du 22 janvier, cela signifie que vous serez inclus dans le plafond (à moins que vous ne correspondiez à l’une des catégories d’exemption déjà mentionnées dans cet article) et que vous devrez obtenir une lettre d’attestation dès qu’elle sera disponible dans la province où se trouve votre établissement d’enseignement. Consultez votre établissement pour plus de détails. N’oubliez pas que le délai de traitement des demandes de permis d’études était d’environ 10 semaines au début du mois de mars, une fois que tous les documents ont été soumis, y compris la lettre d’attestation. Ce délai n’inclut pas le temps nécessaire à la présentation des données biométriques, le cas échéant. Le ministère fédéral de l’Immigration précise également que les délais de traitement peuvent varier en fonction de facteurs tels que la facilité avec laquelle les renseignements peuvent être vérifiés.

 

Est-ce que je reste admissible au permis de travail postdiplôme (PTPD)? J’ai entendu dire que certain.e.s étudiant.e.s étrangers et étrangères ne le sont plus!

Les étudiant.e.s étrangers et étrangères inscrit.e.s à un programme universitaire canadien (tous cycles confondus) demeurent admissibles au PTPD. En outre, depuis le 15 février 2024, les diplômé.e.s de programmes de maîtrise d’une durée de huit mois à deux ans sont admissibles à un PTPD de trois ans s’ils remplissent tous les autres critères. Ce qui a changé, c’est que les nouveaux et nouvelles étudiant.e.s qui obtiennent un diplôme à l’issue d’un programme dispensé par un collège professionnel privé pour le compte d’un établissement d’enseignement public ne peuvent plus prétendre au PTPD. Les étudiant.e.s étrangers et étrangères ne sont pas visé.e.s par cette mesure.

 

Ma capacité de travailler au Canada pendant mes études est-elle touchée?

Aucune modification récente n’a été apportée à la capacité des étudiant.e.s étrangers et étrangères à travailler au Canada pendant leurs études. Consultez le site Web du ministère fédéral de l’Immigration pour plus de détails. Toutefois, des changements sont intervenus en ce qui concerne la possibilité pour l’époux.se ou le ou la conjoint.e de fait d’un.e étudiant.e étranger ou étrangère de travailler. Seuls les époux.ses et les conjoint.e.s de fait des étudiant.e.s étrangers et étrangères inscrit.e.s à un programme d’études supérieures ou menant à un diplôme autorisé par la province (comme le droit, la médecine, l’éducation ou l’ingénierie) pourront prétendre à un permis de travail ouvert.

 

Si je suis déjà au Canada avec un visa de visiteur ou un permis de travail, dois-je fournir une lettre d’attestation lorsque je demande un permis d’études?

Les ressortissant.e.s étrangers et étrangères qui se trouvent au Canada avec un permis de travail n’ont pas besoin d’une LAP pour demander un permis d’études. Certaines catégories de résident.e.s temporaires se soustraient également à cette obligation, mais pas toutes. Assurez-vous de consulter le site Web du ministère fédéral de l’Immigration pour éviter de retarder inutilement le traitement de votre demande de permis d’études.

 

En conclusion

À court terme, les changements apportés aux politiques d’immigration des étudiant.e.s étrangers et étrangères au Canada sont source de confusion et d’anxiété tant pour les personnes visées que pour les établissements. Néanmoins, tout le monde s’accorde à dire que des changements étaient nécessaires pour continuer d’offrir une expérience d’études aussi positive que possible. « Chaque établissement tente de rassurer ses étudiant.e.s et candidat.e.s en leur disant qu’ils obtiendront des réponses en temps utile pour prendre une décision et qu’il demeure intéressant d’étudier au Canada », explique Annik Gélineau, présidente de l’Association des registraires des universités et collèges du Canada.

D’ici là, prenez une grande respiration et ne perdez surtout pas vos objectifs de vue. Il est toujours judicieux de bien comprendre les motivations qui sous-tendent le choix d’un programme et d’un lieu d’études, ainsi que la manière dont ces motivations correspondent à nos intérêts et à nos projets à plus long terme. « Découvrez vos pourquoi et dressez une liste », conseille Lou Janssen Dangzalan, avocat en droit de l’immigration et vice-président de l’Association canadienne des avocats en immigration. « Assurez-vous de tenir compte de vos objectifs et des possibilités qu’offre le Canada. » Se donner des options de programmes et d’universités est aussi une bonne stratégie à suivre pour tout le monde, ajoute Graham Barber d’Universités Canada. « Gardez quelques programmes en tête. Ne vous limitez pas à une seule option, faites votre demande le plus tôt possible et n’oubliez pas de vérifier que vous répondez à tous les critères. »